G7
Les dirigeants du G7 se retrouvent à Biarritz pour trois jours de discussions dans un climat d’incertitude . Boris Johnson est focalisé sur le Brexit, Donald Trump semble de plus en plus imprévisible , Angela Merkel est sortante et le premier Ministre italien Giuseppe Conte a annoncé sa démission .
Les thèmes abordés sont nombreux : climat, Iran, Brexit, Hong Kong, guerre commerciale avec la Chine et taxation des géants du numérique.
Samedi à la mi-journée, Emmanuel Macron s’est adressé aux Français dans un discours télévisé. «Je vous promets de faire, en votre nom, le maximum », a-t-il dit après avoir énuméré les enjeux du week-end.
Mes chers compatriotes, je voulais m’adresser directement à vous, en ce samedi midi, quelques heures avant que ne commence ici même, à Biarritz, le G7.
Dans quelques heures, en effet, j’accueillerai à cet endroit même, devant la ville de Biarritz, les chefs d’État et de gouvernement des États-Unis d’Amérique, du Canada, du Japon, de l’Allemagne, d’Italie, du Royaume-Uni et les institutions européennes. Ces sept grands pays industrialisés, ces sept puissances économiques et militaires que nous formons, partagent les mêmes valeurs démocratiques, et c’est ce qui fait que depuis 44 ans, une fois par an, nous nous réunissons pour échanger sur les grands sujets du monde et essayer de nous coordonner. Cette réunion, elle est utile, elle est importante, sans quoi chacun mènerait son chemin, parfois nous serions amenés à nous diviser, et je crois que ce qui est attendu de nous, c’est plutôt de savoir nous coordonner, agir utilement ensemble.
Alors quels sont, à mes yeux, les enjeux de ce G7 et au fond, qu’est-ce que je défendrai en votre nom, durant ces deux jours ?
D’abord, je crois que ce que, légitimement, vous attendez de nous, tous, c’est de pouvoir assurer la stabilité et la sécurité, protéger la paix dans le monde et donc, nous allons discuter des grands conflits ou des grandes situations les plus tendues : l’Iran, la Syrie, la Libye, l’Ukraine et plusieurs autres sujets de crises à l’international. Sur ces points, nous avons parfois des désaccords, et ces sujets peuvent parfois vous paraître très loin mais ils vous touchent au quotidien. Lorsque la France a été frappée par les attentats en 2015, ils avaient été préparés en Syrie par des djihadistes. Si demain l’Iran se dote de l’arme nucléaire, nous serons directement concernés. Si le Moyen-Orient s’embrase, nous serons touchés. Si nous n’arrivons pas à régler la situation en Libye, nous continuerons de subir collectivement ce scandale d’émigration à travers la Méditerranée et le déséquilibre de toute une partie de l’Afrique. Sur ces sujets, je veux que nous puissions obtenir des accords utiles, défendre la paix, éviter les escalades et nous mettre d’accord.
Le deuxième grand enjeu de ce G7, ce sera la situation de l’économie mondiale. Et là-dessus aussi, cela vous concerne directement. Nous devons œuvrer pour avoir plus de croissance, créer davantage d’emplois, et donc de mieux-être dans nos sociétés. J’ai deux objectifs en votre nom, durant ces quelques jours : d’abord, convaincre tous nos partenaires que les tensions, en particulier les tensions commerciales, sont mauvaises pour tout le monde. Nous devons réussir à avoir une forme de désescalade, c’est-à-dire à stabiliser les choses et à éviter cette guerre du commerce qui est en train de s’installer partout. Ensuite, je crois que nous devons aussi trouver les nouveaux moyens de faire de la vraie relance, c’est-à-dire de relancer cette croissance. Regardez, nos taux d’intérêt, ils sont faibles partout dans le monde. Regardez, pourtant, cette croissance qui est de plus en plus faible, en particulier en Europe. Nous devons donc être innovants et savoir trouver des accords pour que les pays qui le peuvent puissent faire de la relance, réinvestir et investir dans l’avenir, dans l’éducation, dans la création d’emplois.
Et puis le troisième sujet, c’est comment rendre ce monde en quelque sorte plus habitable, meilleur, comment lutter contre les inégalités. C’est ce sujet que j’ai mis au cœur de ce G7. Et je veux qu’il soit utile par des actions concrètes. Alors, les chefs d’État et de gouvernement vont s’engager. Mais j’ai voulu aussi associer d’autres pays comme l’Inde, l’Australie, l’Afrique du Sud, le Chili, qui sont des grandes puissances démocratiques qui ne sont pas dans le G7, mais engagées sur ces sujets avec nous, et nous avons associé la société civile, les entreprises, les associations, les intellectuels, les ONG pour avoir des vraies actions.
Alors, nous aurons des avancées très concrètes, on les a préparées, d’ailleurs, hier à Paris, en matière de lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes, en prenant des lois nouvelles, en s’engageant chacun à le faire, en investissant pour l’entreprenariat féminin en Afrique. Nous aurons des initiatives fortes et nouvelles pour l’Afrique parce que j’ai aussi voulu mettre l’Afrique au cœur de ce G7. L’Afrique, c’est notre voisin le plus proche, c’est notre quotidien d’aujourd’hui et de demain. Et donc, nous allons aussi investir fortement sur ce sujet avec nos partenaires africains.
Nous aurons des initiatives en matière de numérique, pour protéger l’information et les démocraties, avec cette ère du numérique, nouvelle, vous en faites l’expérience chaque jour.
Nous aurons des initiatives également pour rendre notre économie plus juste. On a réussi à engager des dizaines de grandes entreprises et d’investisseurs pour que le but de l’entreprise ce ne soit pas simplement de faire du profit pour les actionnaires mais qu’elles s’engagent elles-mêmes dans leur quotidien à œuvrer pour plus d’égalité, pour préserver l’égalité entre les femmes et les hommes ou la reconstruire lorsqu’elle n’est pas là mais aussi mieux partager la valeur ajoutée.
Et au cœur, au cœur de ce G7 pour lutter contre les inégalités, il y aura le sujet du climat, de la biodiversité. Là aussi vous savez nos désaccords entre certains pays en particulier avec les Etats-Unis d’Amérique. Mais j’ai voulu que ce G7 soit utile et donc nous devons répondre à l’appel de l’océan qui est derrière moi ici à Biarritz et à l’appel de la forêt qui brûle aujourd’hui en Amazonie, de manière là aussi très concrète. Et donc nous allons agir pour l’océan de manière très solennelle : pour la première fois nous allons nous engager : avec les transporteurs maritimes pour réduire la vitesse, ce qui est l’un des moyens les plus efficaces pour réduire les émissions, c’est la première fois qu’on le fait et c’est un vrai changement ; avec les producteurs de textile — les plus grands du monde entier, presque la moitié de l’industrie — Ils vont avec nous s’engager pour là aussi pour réduire les émissions et les déchets : 30 % des déchets que vous avez dans l’océan viennent de l’industrie textile, 8 % des émissions de CO2 que vous avez dans le monde viennent de l’industrie textile. C’est plus que l’ensemble des vols internationaux et des transports maritimes. Pour la première fois ils vont s’engager à agir avec des dates, avec des objectifs. Nous allons œuvrer aussi pour la biodiversité. Et puis l’appel de la forêt c’est l’Amazonie, l’Amazonie c’est notre bien commun. Nous sommes tous concernés. La France l’est sans doute encore plus que d’autres autour de cette table puisque nous sommes amazoniens : la Guyane est en Amazonie. Et donc sur l’Amazonie nous allons lancer, pas simplement un appel, mais une mobilisation de toutes les puissances qui sont là mais en partenariat avec les pays de l’Amazonie pour investir. D’abord pour lutter contre ces feux qui sont en cours et aider le Brésil et tous les autres pays qui sont touchés ; ensuite pour investir dans la reforestation partout ; et pour permettre aux peuples autochtones, aux ONG, aux habitants de développer les bonnes activités en préservant cette forêt dont nous avons besoin parce qu’elle est un trésor de biodiversité et parce qu’elle est un trésor pour notre climat grâce à l’oxygène qu’elle émet et grâce au carbone qu’elle capture.
Voilà quelques-uns des grands sujets et des enjeux. Nous ne réussirons sans doute pas sur tout et ne m’en voulez pas si parfois nous n’y arriverons pas. La France doit faire le maximum mais nous ne pouvons pas tout, tout seul. Mais je veux que ce G7 soit utile et autour de ces trois grands sujets — la sécurité, l’économie et la lutte contre les inégalités je crois que nous pouvons en faire un rendez-vous essentiel. Notre monde est à un moment de bascule et je crois que notre vocation à nous Français c’est d’être dans la proposition, l’inspiration, d’essayer de réduire les désaccords, de ne pas céder aux faiblesses du temps présent, d’avoir cet esprit de résistance qui fait se dire “Il n’y a pas de fatalité.” On doit se battre et conduire les autres à se battre avec nous contre ces injustices ou ces absurdités. Alors je vous promets, en votre nom, de faire le maximum pour mettre mes collègues d’accord sur ces sujets, pour qu’on arrive à faire bouger les choses ensemble.
Je sais que d’autres aussi sont complètement en désaccord avec nous et font parfois des sommets alternatifs. J’écouterai aussi ce qu’ils disent comme j’ai écouté ce matin les propositions ici des villes, des départements et de la région. Mais je veux vraiment les appeler aussi au calme, à la concorde. Nous avons des désaccords, parfois il y a des caricatures, mais je pense que les grands défis qui sont les nôtres, le climat, la biodiversité, la transformation technologique, les inquiétudes dans notre société, la lutte contre les inégalités, cette insécurité qui est partout dans le monde, nous ne les résoudrons qu’en agissant ensemble, qu’en étant davantage réconciliés. Donc je les appelle vraiment au calme et en leur promettant que j’essaierai d’apporter aussi une part de leur vérité autour de cette table.
Voilà chers compatriotes ce que je voulais vous dire ce midi, je viendrai vous rendre compte de manière régulière de ce que nous arrivons à faire ou parfois de ce que nous n’arrivons pas à faire durant ces deux jours. Je voudrais aussi vous dire que j’en ferai un bilan devant vous lundi en fin de journée.
Enfin je veux avoir un mot pour remercier la ville de Biarritz, ses habitants et l’ensemble de nos compatriotes qui étaient parfois ici en vacances. Je sais les contraintes qu’on a imposé à la ville. Elles sont normales parce que la sécurité doit être là pour bien accueillir l’ensemble de ces dirigeants et le monde entier et je veux vraiment les en remercier. Mais je veux aussi vous dire que ce que nous sommes en train de faire est très important et aura des retombées positives pour notre pays, pour le Pays basque, pour la ville de Biarritz parce que nous allons montrer au monde entier la beauté de ce paysage, notre qualité d’accueil, nos traditions, nos savoir-faire et combien la France est belle, et combien nous pouvons en être fier. En tout cas en votre nom je suis très fier d’accueillir ce G7 en France à Biarritz, au Pays basque, dans cette région Nouvelle-Aquitaine. Je serai aussi fier de faire en votre nom le maximum et je serai fier de venir vous rendre compte de manière régulière. C’est à nous de faire et nous le ferons ensemble. Je vous remercie. Vive la République et vive la France !
C’est le Président français Valéry Giscard d’Estaing qui a créé le G7. Du 15 au 17 novembre 1975, le président avait invité au château de Rambouillet près de Paris les dirigeants des six pays les plus riches du monde (France, Etats-Unis, Japon, Royaume-Uni, Italie, Allemagne de l’Ouest). Il voulait établir un contact direct entre les gouvernants dans un cadre informel. L’année suivante ce groupe des six, G6, s’est mué en G7 en accueillant le Canada.